samedi 21 mars 2009

Pute pride, nouvelles frontières de la lutte


Vendredi 20 mars 2009, au Théâtre de l'Odéon, a été annoncée la création du Syndicat des travailleurs(ses) du sexe (STRASS). Six ans après le vote de la Loi pour la sécurité intérieure (LSI), les travailleurs(ses) du sexe dénoncent les conséquences gravissimes d'une loi injuste, qui a fait reculer les droits humains. Et face aux celles et ceux qui agitent le repoussoir du proxénétisme pour justifier de la LSI, les nouveaux adhérents du STRASS répondent : "nous sommes - et avons toujours été - les mieux placé(e)s pour lutter contre les dérives de la profession. Nous ne sommes pas le problème : nous faisons partie de la solution".
A lire. A méditer.
Texte lu lors de la Conférence de Presse des Assises de la Prostitution le 20 mars 2009, par Miguel Ange GARZO

Nous sommes réunis aujourd'hui dans ce cadre prestigieux pour parler de prostitution et pour obtenir l'application des droits des prostituéEs, comme le droit à exercer la prostitution, qui rappelons-le, n'est pas interdit par la loi en France. Depuis mars 2003, déjà six années se sont écoulées et notre constat reste le même : l'article de loi pénalisant le racolage passif met en danger plus que jamais les prostituéEs.

Nombreux sont ceux qui disent que la prostitution est une violence, une violence faite aux corps, et cela, quelque soit le genre de la personne.

Il existe une forme de violence qui est bien présente, tant sur le bois de Boulogne, que dans les bars, les lieux de prostitution en province, ou encore lorsque le travail sexuel est pratiqué à domicile.

Mais cette violence n'est pas due à la prostitution elle-même, lorsqu'elle est un choix.
Cette violence n'est rien d'autre que le résultat des lois qui criminalisent les prostituéEs :

- Le fait de ne pas pouvoir exercer la prostitution librement dans un lieu choisi.
- Le fait de devoir se cacher par peur d'être embarqué par la police.
- Le fait de devoir se cacher quand on est une personne migrante qui exerce la prostitution, de peur de se faire expulser dans son pays d'origine.
- Le fait de ne pas pouvoir payer son loyer, voire même, de ne pas pouvoir subvenir aux besoins de ces proches.
- Le fait d'être montré du doigt par la police quand on est transgenre, et une fois en garde à vue, mis dans une cellule avec des hommes.
- Le fait de ne pas pouvoir avoir accès aux droits les plus fondamentaux, comme par exemple, le fait de se voir refuser la venue d'un médecin lors d'une garde vue.
- Le fait de devoir accepter dans certains cas, quand il y a peu de travail, un client sans préservatif pour la simple raison qu'il va payer un peu plus à un moment où les dettes s'accumulent, et donc se retrouver en situation de risques sanitaires face au VIH et aux IST.
- Le fait de ne pas avoir accès à une couverture sociale.
- Le fait d'hésiter à prendre des préservatifs de peur qu'ils soient confisqués par les forces de l'ordre, ou par peur qu'ils soient utilisés comme preuve de prostitution.
- Le fait de devoir se rendre invisible aux yeux de la police et des passants, et donc d'être plus sujet aux agressions.
- Le fait de se faire agresser, tabasser, violer et de voir sa demande de dépôt de plainte refusée au titre d'être prostituéEe.
- Le fait d'être taxé de proxénète de soutien, parce qu'on a accueilli unE amiE ou bien prêté le camion dans lequel on travaille.
- Le fait d'entendre le Ministère de l'Intérieur dire et affirmer que les prostituéEs sont des délinquantEs et rien que des délinquantEs.
- Le fait d'être confronté au silence et au désengagement du Ministère de la Santé quant à la question de la Santé des prostituéEs, alors que durant la Conférence Mondiale sur le Sida en août dernier à Mexico, le communiqué de Madame Bachelot et Monsieur Kouchner disait, je cite :

« Pour être efficace, la lutte contre le Sida, implique aussi de porter une attention particulière aux populations en situation de vulnérabilité et à celles les plus exposées à l'infection : populations en situation de pauvreté, populations migrantes, minorités sexuelles, usagers de drogues intraveineuses, travailleurs du sexe, populations carcérales, jeunes et enfants. »

Donc oui, la violence est réelle dans le cadre de l'exercice de la prostitution, mais ce n'est pas la prostitution qui la génère, mais bien les lois qui réduisent les prostituéEs à de simples délinquantEs.

Nous, prostituéEs, associations de santé communautaire, associations de lutte contre le Sida, continuerons à nous battre contre cette violence faite aux prostituéEs et à dénoncer les dérives sécuritaires qui ont, et qui mettent encore aujourd'hui en danger, l'intégrité des prostituéEs.

Puisque les prostituéEs sont assimiléEs à des délinquantEs, et bien nous, associations de santé communautaires et associations de lutte contre le Sida, continuerons plus que jamais à soutenir ces dites, délinquantEs.

Les prostituéEs ne sont pas le problème : elles font partie de la solution.

Bravo au photographe François Lafite pour ses photos.

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